- Donc les idées seraient vivantes ?
- C'est l'idée, oui.
Il existe une théorie selon laquelle les idées seraient une forme de vie, différente de la nôtre... Et donc, qu'elles seraient vivantes.
Mais avant de vous en parler un peu plus, j'aimerais d'abord vous remercier d'être si nombreuses et nombreux à me lire chaque lundi dans cette lettre. Si la Scribouille vous plaît (et j'espère que c'est le cas), parlez-en autour de vous, à vos amies autrices ou des collègues désireux d'apprendre l'écriture ! La newsletter vit pour et grâce à vous, elle est entièrement gratuite et le restera. Si vous voulez soutenir mon travail, présenter la Scribouille à vos amis est l'un des meilleurs moyens ! Merci du fond du cœur !
Les idées, donc, seraient une forme de vie désincarnée mais capable d'agir. Elles n'auraient pas une forme matérielle, mais possèderaient une volonté propre.
Leur but ?
Si celui des animaux est de survivre, et celui des écrivains de créer les plus belles histoires, les idées seraient mues par une unique pulsion : apparaître dans le réel. Sortir de l'ombre, de l'espace, du vide, de l'éther, pour se révéler dans notre dimension à travers les humains.
Toujours selon cette croyance, TOUTES les idées existantes dans le monde, qu'elles soient artistiques, morales, scientifiques, industrielles, religieuses, politiques, seraient perpétuellement en train d'essayer de trouver des partenaires humains disponibles et capables de les transformer en créations.
Admettons, juste le temps de cette newsletter, que cette théorie soit vraie. Vous êtes écrivain, autrice, auteur, artiste, et vous considérez les idées comme des entités mues par une volonté propre.
Un jour, une idée vous rend visite. N'ayant pas de forme matérielle, vous ne pouvez la voir ni la toucher : seulement la percevoir, dans votre esprit, en pensée, si vous êtes suffisamment disponible et attentive.
L'idée tente d'attirer votre attention en vous envoyant des images, des scènes, des personnages peut-être, ou parfois juste une ambiance. Tout ce qui a trait à votre activité artistique et que vous pouvez visualiser.
Mais bien souvent, vous ne la remarquez pas : vous êtes concentrée sur un problème dans votre vie, vous rédigez un courrier, vous faites les courses ou le ménage...
L'idée, selon sa patience et son envie de collaborer avec vous, persistera quelques heures, quelques jours, quelques mois, voire plusieurs années.
Mais si vous ne la remarquez pas, si vous ne lui donnez aucune attention, au bout d'un moment, elle partira pour chercher quelqu'un d'autre.
Imaginons que vous lui donniez de l'attention, à un moment de calme dans votre vie quotidienne. Vous regardez le paysage défiler dans le train, vous écoutez de la musique ou vous faites du sport, par exemple. L'idée, voyant que vous êtes disponible, vous enverra alors ce qu'on peut appeler de l'inspiration.
Vous savez, quand vous avez l'impression que toutes sortes de signes désignent cette idée. Que le monde converge soudain vers le même point, et tout vous fait penser à votre idée d'histoire, de sculpture, de dessin. Vous terminez justement la lecture d'un livre qui colle avec votre idée, vous entendez parler d'un événement ou d'un concept qui s'y rapporte, ou vous visitez un endroit où vous verriez bien se dérouler cette scène que vous avez en tête...
L'idée sèmera tout un tas de petites coïncidences pour maintenir votre intérêt. Elle usera de toutes les possibilités : vous déconcentrer pendant que vous rédigez votre courrier, vous réveiller en pleine nuit, vous détourner de votre liste de courses... Elle ne vous laissera en paix que lorsqu'elle aura votre entière attention.
Et à ce moment-là, elle vous demandera...
Veux-tu travailler avec moi ?
Cette théorie est notamment défendue par l'autrice américaine Élisabeth Gilbert. Qu'on soit d'accord ou non, je trouve que cette réflexion en dit beaucoup sur le fonctionnement du processus créatif.
Oui, il faut être réceptif et disponible pour avoir de bonnes idées.
Et on peut perdre la flamme sur un projet de roman auquel nous n'avons pas accordé assez de temps, de travail ou d'attention.
Quand on s'engage à travailler sur une nouvelle histoire, c'est comme faire une promesse à soi-même. C'est se dire : je m'engage à accorder du temps et de l'énergie à cette histoire, parce que j'ai envie de la mener à bien jusqu'au bout. Parce que j'ai envie d'en faire un livre, j'ai envie qu'elle soit lue, et qu'elle soit aimée.
Par ailleurs, je trouve assez sain de se dire que les idées sont vivantes, qu'elles ne dépendent pas entièrement de nous : ça déresponsabilise l'autrice et allège le poids créatif qu'on peut s'infliger parfois. Vous savez, quand on se dit qu'on est pas assez original, que nos idées sont nulles, qu'on a pas les capacités d'y arriver... et toutes les peurs qui vous chuchotent à l'oreille d'abandonner.
Dans la première newsletter, je vous parlais de la peur, justement : je vous disais combien elle est collante, indissociable du processus créatif, mais pas malveillante cependant. Et bien, il est temps de parler de l'autre versant, l'autre entité qui vous accompagne sur le chemin de l'écriture : la créativité. Les idées.
Veux-tu travailler avec moi ?
Si vous répondez oui à cette question, vous signez un contrat avec l'inspiration (avec vous-même) : vous vous engagez à accorder temps et énergie à cette idée d'histoire, dans le but de la mener jusqu'au bout, même si le résultat final est difficile à prévoir (vais-je réussir, vais-je être publiée, est-ce que l'histoire va plaire aux lectrices ?).
Et ce qui est bien avec ce contrat créatif, c'est que c'est VOUS qui fixez les termes du contrat. Vous décidez du temps que vous allez y passer, de l'énergie que vous allez y consacrer, de la façon dont vous allez travailler, où, quand et comment...
Et c'est terrible, mais la plupart du temps, les autrices et auteurs font le choix d'un contrat de souffrance avec leur créativité...
Une souffrance créative, morale et même physique.
Nous en parlerons lundi prochain ! Comme d'habitude, n'hésitez pas à me dire si cette newsletter vous plaît et partager vos réflexions en répondant simplement à ce mail. C'est toujours un réel plaisir de vous lire !